Monsieur le
Ministre,
Vous
venez d'annoncer un plan d'avenir de la filière porcine française qui permette
l'allégement des contraintes portant sur les installations classées, en
remplaçant, lors d'agrandissement ou création d'élevage, la procédure d'enquête
publique par un simple régime d'enregistrement. Nous nous permettons d'attirer
votre attention sur plusieurs points :
Ce plan est proposé en réponse aux
demandes de la FDSEA et des Jeunes Agriculteurs du Finistère, qui réclament un
"moratoire sur les nouvelles règles environnementales" et prétendent
qu'"en 10 ans, la Bretagne aurait perdu trois millions de porcs".
Nous mettons en cause la véracité de ces chiffres, contredits par les
statistiques récentes de la DRAAF qui montrent une augmentation de la
production porcine bretonne qui est passée de 13,3 millions en 2000 à 14,3
millions en 2010. C’est 60 % de la production française, avec des exploitations
qui s'agrandissent sans cesse en détruisant des emplois.
Ce plan intervient alors que la justice française
vient de prononcer 4 condamnations qui mettent en cause le laxisme de l'Etat en
matière d'environnement.
La justice a rejeté la demande
d'assouplissement des contraintes environnementales, en application de la
directive européenne "nitrates", jugées "disproportionnées"
par la FDSEA et les Jeunes agriculteurs du Finistère. Les juges ont considéré
que ces mesures d'intérêt général «ont pour but la protection des eaux
contre la pollution par les nitrates d'origine agricole" et qu'il
n'est pas établi que "ce but aurait pu être atteint par des mesures
moins contraignantes». (Tribunal
administratif de Rennes 29 mars 2013).
Les juges ont donné
raison au contraire, aux associations environnementales qui demandaient le renforcement
des règles d'épandage, en obligeant les préfets à revoir leurs décrets
d'autorisation d'épandage.
L'Etat a été condamné à
rembourser 4 communes des Côtes d'Armor des dépenses de ramassage d'algues vertes
engagées en 2010, pour un montant de 122
932 euros (Cour administrative d'appel de Nantes 22 mars 2013).
L'Etat devra indemniser
le Conseil Général des Côtes d'Armor pour toutes les dépenses effectuées entre
1975 et 2009 pour plus de 7 millions
d'euros. Le lien direct et certain de cause à effet entre ces carences
fautives de l'État et le dommage que constitue la pollution par les masses
d'algues vertes" sur le littoral armoricain, a été établi par les
juges qui rappellent qu'il est «constant et non contesté" que les pollutions d’origine agricole des
eaux superficielles et souterraines en Bretagne constituent la cause principale
de la prolifération des algues vertes sur le littoral. (Tribunal
administratif de Rennes 12 avril 2013).
Au moment où vous proposez d'assouplir les règlements, la justice
vous rappelle que les contraintes environnementales doivent donc être
maintenues et renforcées. Sinon, la France sera à nouveau condamnée par la Cour
de Justice Européenne. Quel avenir pour une agriculture industrielle qui
détruit à la fois l’emploi et l’environnement avec une production à bas prix
qui ne peut s’adapter à la concurrence mondiale ? La Coordination algues
vertes et bleues demande au gouvernement d’éviter de prendre une décision qu'elle estime préjudiciable à la
société toute entière et d'engager la transition vers un modèle agricole et
économique qui valorise nos productions et respecte enfin notre patrimoine
environnemental.
Les associations de la Coordination Verte
et Bleue : AE2D, Association de Sauvegarde du Pays Fouesnantais (ASPF), Baie de
Douarnenez Environnement (BDZE), Sauvegarde du Penthièvre, Sauvegarde du
Trégor, Sous le vent les pieds sur terre