lundi 16 juin 2014

Algues vertes 2009 et intoxication H2S : un été meurtrier. Retour sur l'accident du travail de Thierry Morfoisse

Retour sur l'accident du travail de Thierry Morfoisse

Auteur : Gilles Willems, pour le Comité de soutien à la famille de Thierry Morfoisse et Sauvegarde du Penthièvre
SOMMAIRE
L’accident.
Contexte costarmoricain à l’origine d’un silence.
La mort d’un cheval qui cache celle d’un homme.
Une affaire politique.
Des choix difficiles.
Une affaire qui devient sordide.
L’affaire est close ?
La constitution du Comité de soutien à la famille de Thierry Morfoisse.
L’Affaire Morfoisse au Pôle Santé de Paris.
Putain d’algues, j’en ai marre !

 L’accident.

Le mercredi 22 juillet 2009, sur la route de Launay-Lantic / Binic en Côtes-d’Armor, Thierry Morfoisse, chauffeur de camion pour l’entreprise SCREG-Nicol-Environnement, âgé de 48 ans, a un malaise au volant de son véhicule qui termine sa course, lentement, dans un mur. Il sort de la cabine de son camion, est pris de vomissements et s’écroule au sol. Il est immédiatement secouru par trois témoins, un couple de médecins de Binic et un gendarme en vacance qui suivaient séparément le camion en direction de Binic. Le chauffeur est dans le coma, ils tentent de le réanimer, en vain et appellent les secours. Thierry Morfoisse meurt au pied de son camion avant l’arrivée du SAMU vers 15h. Le gendarme témoin déclarera le plus dur, est qu’il m’a lâché dans les mains.
Cet après-midi là[1], Thierry Morfoisse remplace, un collègue qui avait fait un malaise, avec saignement de nez, en transportant, lui aussi, des bennes d’algues vertes et avait stoppé son service à midi. Thierry Morfoisse avait laissé à l’heure du déjeuner, un dernier message à sa compagne où il disait « putain d’algues, j’en ai marre !». Il quitte le SMITOM[2] de Launay-Lantic où il avait déchargé sa troisième benne d’algues vertes en putréfaction provenant des plages de Binic à 14h45. C’était le transport de trop, car moins d’un quart d’heure après, il s’écroulait inanimé au bas de son camion sur la route de Binic, en allant chercher un quatrième chargement. Contrairement aux employés du SMITOM, Thierry Morfoisse (et ses collègues) n’était pas équipé de détecteur d’H2S et n’avait pas de masque [3].
Les parents et la fille de Thierry Morfoisse, effondrés, ne pourront voir son corps que le lendemain, à midi moins le quart, non pas à l’hôpital de St Brieuc, comme ils l’avaient pensé, mais à la chambre funéraire de Lanvollon où le corps avait été directement envoyé par l’entreprise de pompes funèbres. Son visage était totalement cyanosé malgré le maquillage effectué et ses mains totalement noirâtres. Le certificat de décès indique pourtant une mort naturelle ?
Très tôt, le doute sur l’origine du décès s’installe. François Morvan, le maire de Lanvollon, l’évoque dés le lendemain de l’accident avec l’un des employés de sa commune. Il apprend que le fils de ce dernier travaille lui aussi à convoyer des algues. Qu’il vient de prendre trois jours de RTT parce qu’il a mal à la tête (était-ce le salarié que remplaçait Thierry Morfoisse ?)… Les conditions et les risques sanitaires du travail sont évoqués Au chargement, je ne pense pas qu’il y ait de problème. Mais lorsqu’il décharge, l’employé se prend une bouffée en ouvrant les portes du caisson. Or il semblerait que l’un des chargements attendait sur la plage depuis la veille déclare-t-il.[4]
Les dirigeants et collègues du chauffeur de la SCREG se rendent à la chambre funéraire. Ils sont accompagnés de  l’ancien « patron », Mr Nicol, qui s’adresse à la famille. Il rend un hommage sincère au chauffeur en  déclarant que c’était « un gars courageux, sérieux et consciencieux » en ajoutant aussi que sa mort est « un accident du travail[5] ».
Les parents et la fille[6] de Thierry Morfoisse sont trop anéantis pour faire le lien entre l’infarctus et l’H2S dégagé par les algues en putréfaction et ne peuvent réagir immédiatement à cette réflexion importante.
Cet accident mortel est très certainement connu et suivi de près à la préfecture dès les premières heures du décès du chauffeur. Comment, en effet, sérieusement, envisager l’inverse sur un sujet si délicat et brulant, d’autant plus que la mort ne touche plus des animaux mais un salarié travaillant au processus du nettoyage des côtes du département. Cela en pleine saison touristique. Aucune information ne filtre dans la presse locale ou nationale.


Contexte costarmoricain à l’origine d’un silence.

En ce début de vacances estivales 2009, deux sujets dominent la France : le temps, assez capricieux et l’épidémie de grippe H1N1.  Au plan local, la Bretagne tente de panser ses plaies liées à son modèle de production agricole et au désastre économique, social et environnemental qu’il provoque.
Avec l’affaire des deux chiens empoissonnés par les gaz des algues en décomposition, l’année précédente, le 12 juillet 2008 à Hillion en baie de St Brieuc (évènement qui a attiré les médias internationaux et terni l’image de la Bretagne et son mode de production agricole intensif) les langues se délient : les algues vertes tuent. Avant la mort de ces deux chiens, ce n'est pas un ou deux animaux qui sont morts, mais en dix ans, près de 30 chiens consignés dans un registre de la mairie d'Hillion... Sans compter les oiseaux morts et plusieurs chevaux dont la mort fut attribuée à leur faiblesse physique.
Dans la plainte d'Aurore Blairon (la propriétaire des chiens), il se confirme que la justice peut retenir la culpabilité de l'ensemble des élus municipaux, ceux de la communauté d'agglomération et le gestionnaire de la réserve naturelle. Cela, dans le cadre du non respect des directives de précautions rendues obligatoires, par la lettre qu’a adressé le préfet des Côtes d'Armor le 1er octobre 2007 aux maires du département, pour qu'ils prennent des mesures de précaution, notamment auprès du public et des travailleurs en contact (long ou répété) avec les algues en décomposition.
Cette directive préfectorale s’inscrivait en réponse au procès, contre l’Etat, intenté par les associations environnementales bretonne en 2003/2004 pour faire reconnaître le non respect des directives européennes sur l’eau et le danger de l’hydrogène sulfuré dégagé par les algues vertes en décomposition[7].
Dans ce contexte, la plainte d’Aurore Blairon, déposée en gendarmerie, prend des proportions importantes. Il faut étouffer l'affaire qui est rapidement classée sans suite par le procureur.
Dans le cadre de la préparation d'une conférence du docteur Claude Lesné du CNRS et du Département de Santé Publique de l'Université Rennes I, à St Michel en Grève (baie de Lannion), sur la toxicité de l'hydrogène sulfuré issue des algues vertes, un courrier est envoyé par Yves-Marie Le Lay (Président de Sauvegarde du Trégor) au préfet pour connaître les causes de la mort des chiens. La réponse du Préfet, en contradiction avec sa lettre envoyée aux maires du département le 1er octobre 2007, minimise totalement la dangerosité des algues en décomposition. Le message est clair, il ne faut pas affoler les populations, les touristes et pour d'autres raisons fâcher les tenants de l'industrie agro-alimentaire intensive.
Au cours de la conférence, qui se tient le 26 septembre 2008, des témoins se font connaître : Pierre Philippe, médecin urgentiste à Lannion a traité des accidents graves liés aux algues en décomposition sur les plages du secteur de St Michel. Il a d'ailleurs plusieurs fois alerté la DDASS des Côtes d'Armor sur ce danger. Une de ces victimes, Maurice Briffaut, témoigne : employé au ramassage des algues de St Michel, il fut gravement intoxiqué en juillet 1999. Il est resté 5 jours dans le coma et plusieurs mois à l'hôpital. Il a été sauvé d'extrême justesse. Pierre Philippe rappelle aussi la mort de Jacques Therin, le jogger mort en 1989 et l'hypothèse de sa mort par l'hydrogène sulfuré, évoquée à l'époque par Ouest-France...
L’épisode médiatique de la mort des chiens et la plainte de leur propriétaire ne fait que renforcer la position jusqu’au-boutiste des tenants du modèle breton de l’agro-industrie intensive. Pour eux, les algues vertes ne sont pas dangereuses et encore moins mortelles et pour beaucoup, leurs soucis économiques et sociaux sont imputables aux écologistes qui veulent imposer de nouvelles normes restrictives de production. L’épisode Thalassa vient renforcer, le 09 avril 2009, cette dérive. Un déchainement haineux se déverse contre Georges Pernoud qui est menacé et ne doit plus remettre les pieds dans le département.
En ce début d’année 2009, le monde agricole breton est en crise profonde. La situation des éleveurs de porcs est fragile, voire désespérée : concurrence, augmentation du prix des aliments, baisse au cadran, faillites et suicides. Une grande manifestation est organisée le 30 avril à St Brieuc. Le 14 juin, c’est au tour des éleveurs laitier de manifester à St Brieuc. Dans la soirée le centre ville, autour de la Préfecture et de la cathédrale, est saccagé.
En ce début de saison estivale, tout est fait par les autorités locales pour redorer l’image touristique des côtes bretonnes et particulièrement celles des Côtes d’Armor. Il faut effacer l’image désastreuse donnée l’année précédente avec la mort des deux chiens à Hillion et surtout combattre l’image laissée par l’émission de Thalassa. La convergence de ces éléments explique le silence sur l’accident professionnel mortel du chauffeur de la SCREG dans la presse locale. Dans les médias nationaux, le danger sanitaire ne vient plus de la mer mais du ciel, avec l’opération orchestrée par Roselyne Bachelot autour du risque de grippe aviaire.
Les efforts déployés pour offrir au touriste une autre image des Côtes d’Armor sont vains. Car la dangerosité des algues vertes réapparaît moins d’une semaine après la mort de Thierry Morfoisse, le 28 juillet.

La mort d’un cheval qui cache celle d’un homme.
Le 28 juillet, à St Michel en Grève, un cavalier, Vincent Petit s'enfonce involontairement dans une matière vaseuse, d'algues vertes et de sable, avec son cheval qu'il tenait à la bride. Il s'écroule très rapidement inanimé dans les algues et est sauvé par un employé chargé de leur ramassage avec son tractopelle. Le cheval, qui était en très bonne santé est foudroyé, en moins de deux minutes, par l'hydrogène sulfuré qui se libère sous son poids. Ce nouveau drame se déroule à quelques centaines de mètres d'où Maurice Briffaut est tombé dans le coma dix ans plus tôt et certainement dans les mêmes conditions que Jacques Thérin mort en 89 !
Les premiers articles locaux parlent d'un cheval étouffé dans la vase, mais non d'hydrogène sulfuré, alors que ce gaz était fortement évoqué vingt ans plus tôt ! La mort du cheval éclipse la mort frôlée de près de son cavalier[8] et éclipse totalement la mort de Thierry Morfoisse...
9 août, manifestation organisée par Sauvegarde du Trégor à St Michel en soutien à René Ropars son maire. Le mot d'ordre principal est : que les coupables de la pollution soient identifiés, que les préfets des Côtes d'Armor et du Finistère ne se défaussent pas sur un élu à qui personne ne peut rien reprocher. Une première campagne de plaintes individuelles est lancée à cette occasion.
La pression médiatique devient forte pour le gouvernement. Chantal Jouanno diligente une étude sur la toxicité des marées vertes pour le Premier Ministre François Fillon qui se déplace le 20 août à St Michel. Il est entouré de sa Secrétaire d'Etat, des ministres Bruno Le Maire et Roselyne Bachelot, du député Marc Le Fur, puis viennent derrière, les représentants des syndicats de l'agro-alimentaire et des Chambres d'Agricultures.
Puis Fillon reçoit, pour un entretien informel, hors caméras et micros, les représentants des associations qui luttent et dénoncent depuis des décennies la dangerosité de ces pollutions. Ils semblent peu écoutés et seul le témoignage de Maurice Briffaut rend attentif le Premier Ministre. La seule annonce qui conclue ce déplacement est le lancement d’un Plan Algues Vertes.
Une affaire politique.
Le lendemain, Thierry Burlot Président du SMITOM de Launay-Lantic est interviewé. Il rentre de vacances et est très inquiet[9].  Ce dossier des algues vertes prend une nouvelle tournure… pour la santé publique de tout un chacun, c’est un sujet dangereux. En ne se limitant qu'aux cas des animaux morts, il ajoute inquiet que ces algues peuvent représenter un vrai péril pour la santé publique. Pour lui le plan Fillon ne va pas assez loin et il pose la question Qui demain sera responsable s'il y a de nouveaux drames ?(…) Peut-on garantir en tous temps la sécurité des ouvriers qui vont travailler autours de ces produits. A la question concernant la dangerosité des algues vertes pour les personnes qui les transportent, il précise que c’est toute une filière qui est concernée et aujourd’hui dans les propositions du Premier Ministre, ces questions ne sont pas abordées, mais elles sont fondamentales. Peut-on garantir en tous temps la sécurité des ouvriers qui vont travailler autour de ces produits. On sait bien que c'est le modèle agricole breton tel qu'il a vécu qui est aujourd'hui à l'origine de tout cela. Avant de critiquer les propositions Fillon, basées essentiellement sur le ramassage et le traitement des algues vertes. Pour Thierry Burlot se profile un désengagement de l'Etat pour réformer l'ensemble de la filière agro-alimentaire et un risque de plus en plus accru de voir les maires des communes littorales comme seuls responsables des drames liés aux algues vertes[10].
Le sujet de la dangerosité des algues vertes et de ses conséquences sur la santé publique devient une préoccupation insoluble pour les acteurs politiques (même si certains nient encore le danger) et derrière la mort foudroyante du cheval perce celle du chauffeur au bas de son camion. De la mi-août à septembre les langues se délient, des salariés se confient et témoignent anonymement[11], car les pressions sont réelles pour les obliger à se taire au sujet de leurs conditions de travail.

Des choix difficiles.
C’est le 29 août que les parents de Th. Morfoisse rencontrent pour la première fois, une personnalité officielle depuis l’enterrement de leur fils en la personne de Thierry Burlot qui les reçoit à la mairie de Lanvollon avec François Morvan. Th. Burlot téléphone à la SCREG et au cours de la conversation, avec un responsable, les parents apprennent (au sujet des frais d’obsèques qu’ils ont eux-mêmes réglés) que la société a déjà versé suffisamment d’argent et qu’elle ne souhaitait plus en donner.
Ils sont très étonnés de cette réponse et protestent auprès de Th. Burlot en expliquant qu’ils ne sont pas là pour de l’argent et que, ni eux, ni leur petite fille n’en ont demandé à quiconque et qu’ils n’en ont pas reçu de l’entreprise. Ils sont devant lui pour connaître la vérité sur les conditions exactes de la mort de leur fils afin que le drame qu’ils connaissent ne se reproduise plus. Pour eux en effet, la mort naturelle ne tient pas. Mais ils pensent qu’au contraire que, comme dans l’affaire des chiens ou du cheval, la mort de leur fils est liée aux algues vertes et à son travail, à ces bennes supplémentaires qu’il n’aurait jamais dû transporter. C’est au cours de cet entretien que Th. Burlot leur conseille de porter plainte et de demander une autopsie de leur fils.

Si ce dernier point est une solution pour faire la lumière sur le décès, psychologiquement c’est une solution très violente que ne peuvent accepter ces parents minés par la peine. Pour eux, les faits parlent d’eux mêmes et ils sont renforcés par la mort du cheval. Il est donc totalement inconcevable que leur fils soit extrait de sa dernière demeure. Il faut le laisser en paix. Ils refusent donc l’autopsie. Quand à porter plainte, ils ne sont pas prêts non plus car c’est une démarche qui leur est totalement étrangère. Ils n’en ont par ailleurs pas les moyens. Quelques jours plus tard Thierry Burlot évoque l’entretien : je me suis engagé à respecter leur volonté. Je ne solliciterai donc pas d'autopsie. Par ailleurs, lors de cette rencontre, je leur avais dit que j'écrirais au préfet: c'est ma responsabilité en tant que président du centre. Car si le décès a un lien avec le transport des algues, cela aura des conséquences infinies sur le fonctionnement de nos collectivités[12].
Tout début septembre, Thierry Burlot, tient parole et écrit au préfet. Il provoque ainsi une enquête préliminaire avant instruction. A Ouest-France, il avait confié que cet agent les (les algues) déchargeaient à mains nues et sans protection : ni masque, ni détecteur d'hydrogène sulfuré..[13].
Le 07 Septembre le procureur Gérard Zaug ouvre l’enquête préliminaire après avoir beaucoup hésité. Il envoie au laboratoire alsacien Chem Tox un échantillon du sang prélevé lors du décès du chauffeur[14]. Prélèvement qui avait été conservé, à l’hôpital de St Brieuc, au frais dans de bonnes conditions[15]. Grâce à cette procédure, la mort du chauffeur de la SCREG sort enfin de l’ombre et certains journalistes de la presse régionale (Télégramme et O-F) informent, dans le détail, les lecteurs de ce qui devient peu à peu l’affaire Morfoisse.  
Dans le même temps, par le compte rendu du Conseil Municipal de Binic, du 08 septembre 2009, nous apprenons que la SCREG a cessé sa prestation dans l’attente de l’enquête en cours et faute de prestataire, ce sont les services techniques de la ville qui font le travail de transport des plages au SMITOM[16]. Est-ce vraiment la seule raison ? En quoi, l’enquête préliminaire implique t’elle un arrêt des activités de la SCREG ? Ne faut-il pas voir dans cet arrêt, une mise à l’ombre des collègues de Thierry Morfoisse, qui pourraient témoigner hors de tous contrôles, comme ils l’avaient fait quelques mois auparavant devant une inspectrice du travail qui avait recueilli leurs doléances[17].
Une affaire qui devient sordide.
Le 25 septembre, la famille Morfoisse rencontre pour la première fois le procureur Gérard Zaug, au tribunal de St Brieuc. La convocation s’est faite au téléphone : Tout, dans cette histoire s’est fait par téléphone, de l’annonce de la mort de notre fils à la convocation chez le procureur, même les résultats d’analyses ne nous ont été donné qu’oralement, nous n’avons aucune trace écrite, aucun document papier du tribunal, de la gendarmerie. La mort de notre fils n’existe pas, c’est comme si on avait souhaité d’un bout à l’autre, nous écarter de cette affaire[18].
Le 25 septembre le procureur Zaug a convoqué la famille Morfoisse pour lui faire part des résultats d’analyses de sang. Il y a effectivement de l’hydrogène sulfuré dans le sang analysé, mais, chose incroyable, le procureur refuse d’en révéler le taux.
Le coup de massue pour la famille est donné lorsqu’il indique que cette analyse n’a aucune valeur car la poche de sang qui fut analysée n’a pas été conservée (contrairement à ce qu’il avait indiqué quelques semaines plus tôt) dans de bonnes conditions, mais à température ambiante ! La cause de la mort retenue reste donc la mort naturelle par infarctus et cela n’a rien à voir avec les algues vertes !
C’est, dans le cas de la mort d’un salarié, travaillant régulièrement sur une matière aussi sensible et potentiellement dangereuse que l’algue verte en putréfaction, une annonce totalement incroyable. La dangerosité des algues vertes est dénoncée depuis des années par les associations environnementales et le sujet a impacté très durement l’image du département toute l’année écoulée. Il est impossible dans ce cas précis qu’aucun protocole rigoureux n’ait été suivi par les gendarmes et l’hôpital dans le cadre de la mort d’un chauffeur transportant régulièrement des algues vertes en putréfaction[19]. Pour la famille de Thierry Morfoisse, c’est un véritable choc. C’est aussi un grand désarroi, d’autant plus que le procureur leur déconseille fortement tous contacts avec la presse, les syndicats ou les associations…
Le procureur annonce une véritable anomalie, une véritable destruction de preuve judiciaire et n’entame même pas l’ombre d’une enquête pour en rechercher les causes, les responsables ? Quels sont ses véritables objectifs ? Pour Thierry Burlot c’est assez clair : Depuis le début, dans cette affaire, tout me semble un peu invraisemblable. Depuis le début aussi, je sais très bien que l'Etat cherche à minimiser, cherche à laisser croire ou entendre qu'il n'y a aucun lien entre le décès et le travail que venait d'effectuer Monsieur Morfoisse. J'ai le sentiment qu’aujourd'hui nous sommes dans la continuité. A ce jour, les prises de sang ont parlé, elles ont visiblement démontré qu'on y trouve de l'hydrogène sulfuré.  Ce gaz se crée par la fermentation des algues vertes. Tout ce que l'on peut nous répondre, c'est que cela n'a rien à voir avec les algues mais que cette présence serait liée à une mauvaise conservation d'une poche de sang ; ce qui m'apparaît complètement inouï[20].
Un lourd doute, dans ce contexte, reste difficile à dissiper. Et si la première information fournie par le procureur concernant l’envoi d’un échantillon sanguin bien conservé était la vérité et qu’il n’y ait jamais eu de fautes dans le protocole de conservation ? Cela impliquerait que le taux d’H2S dans le sang analysé soit entièrement lié à l’inhalation à forte dose de gaz d’algues en putréfaction transportées (et surtout déchargées) par Thierry Morfoisse. Cette vérité pourrait expliquer aussi pourquoi l’enquête, pour trouver fautes et erreurs dans le protocole, ne s’est toujours pas faite, car elle est impossible à réaliser !
Le procureur ne se limite pas, à ne pas enquêter là où il faut, il tente aussi de diviser les parties qu’il a en face de lui, notamment sur les questions de l’autopsie et de la politisation possible de l’affaire. Car il a bien compris que sur ces questions, il y avait pour lui une opportunité de division. Th. Burlot souligne cette stratégie : Je rappelle aussi qu'il m'a mis en cause en me reprochant d'avoir émis des doutes sur les circonstances du décès de M. Morfoisse. Il l'a notamment fait devant la famille et par voie de presse. Je n'oublie pas[21]. C’est cette stratégie de division du procureur qui explique les premières déclarations des parents du chauffeur. Pour Mr Morfoisse : c’est du harcèlement écologique. (…) C’est inhumain de la part des élus de nous mettre ainsi sous pression ![22] et pour Mme Morfoisse : C’est bien trop politisé, cette affaire. Mon fils, je veux qu’on le laisse en paix[23]. 
Dans une autre interview, Thierry Burlot, qui va alors se mettre en retrait pour ne pas « politiser » l’affaire, indique : Une chose est certaine, à un moment donné, je parlerai, j'ai tout noté depuis le début de cette affaire, les propos des uns et des autres. Parfois je vis très mal ce sentiment que tout est fait pour ne pas rentrer dans le coeur de l'enquête. Cette attitude de la part de la justice me déçoit beaucoup.[24]
Le 29 septembre, le procureur fait exhumer le corps de Thierry Morfoisse, en cachette, contre la volonté de ses parents. Il veut faire analyser le cœur et les poumons. Sa stratégie est claire, il ne fait ces analyses que pour prouver la mort naturelle, c’est à dire l’infarctus ! Nous fonctionnons par élimination car l'autopsie et cette nouvelle analyse ne nous diront pas que le décès est dû aux algues vertes. (…) Si ça ne nous dit pas de quoi il est décédé, le mystère restera entier. Et dans l'immédiat, je ne sais pas comment nous procéderons alors[25]L’aveu est net et sans ambiguïté, ses investigations doivent éliminer toutes recherches de liens entre l’H2S des algues vertes en putréfaction et les causes de l’infarctus mortel !
 Dès le 02 octobre, Claude Lesné lui répond. Comme en 2008 et comme le mois précédant, il démontre une nouvelle fois que l’inhalation de 500 ppm d’H2S, peut provoquer le coup de plomb du vidangeur et aussi surtout qu’à une moindre dose, un œdème du poumon ou une crise cardiaque peut survenir[26]. Qu’à cela ne tienne, Gérard Zaug poursuit son plan de diversion.
Quelques jours plus tard, Carolanne, la fille de Thierry Morfoise ouvre un blog dédié à la mémoire de son père, elle y clame son besoin de vérité sur sa mort afin que ce drame ne se reproduise plus. 
Le 09 octobre, Thierry Burlot est contacté par le préfet qui lui demande s’il a reçu les résultats de l’autopsie qui doivent être donnés ce jour même. Le Président du SMITOM est très étonné, d’autant plus que le préfet lui indique que la situation pourrait devenir compliquée et qu’il faut qu’ils se revoient rapidement[27].
Ce n’est que le 5 novembre 2009 que le procureur communique enfin les conclusions de l’autopsie. Thierry Morfoisse n’est pas mort à cause des algues vertes en décomposition, mais selon ses conclusions, à cause d’une récidive d’infarctus du myocarde. C’est à partir de cette annonce qu’il va forger cyniquement le portrait d’un salarié mort à cause d’une mauvaise hygiène de vie. Pour lui, Thierry Morfoisse était un gros fumeur et l’examen montre aussi des artères bouchées par le cholestérol et autres matières de cette nature. Les algues vertes n’ont pas contribué à son décès. Il ne peut être établi de lien entre son décès et les algues vertes[28].
Pourtant, en tant que chauffeur de poids-lourd, Thierry Morfoisse était régulièrement suivit par la médecine du travail et celle-ci n’a semble-t-il jamais rien détecté d’anormal. Concernant la nourriture, il mangeait comme ses collègues dans les mêmes routiers le midi, régulièrement aussi chez ses parents. Il buvait très peu et fumait moins d’un paquet par jour. D’anciens collègues de travail du chauffeur vont pourtant, à partir de cette période, prétendre qu’il fumait jusqu’à cinq paquets de cigarettes par jour… Cela est tellement gros, que c’en est grotesque et plus du tout crédible, mais calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose et c’est ce que compte bien le procureur en tirant ces quelques dernières cartouches.
Les personnes qui osent briser le silence pour s’exprimer sur ce drame deviennent rares. François Morvan, le maire de Lanvollon est un de ceux là : Depuis le début, j'avais la certitude qu'il y avait bien un lien de cause à effet entre le transport d'algues et le décès de M.Morfoisse. Peut-être que M.Morfoisse avait un terrain fragile, mais s'il n'avait pas été en contact avec les algues vertes ce jour-là, il est clair qu'il serait aujourd'hui en vie. Il est évident qu'en déchargeant les bennes, Thierry Morfoisse a inhalé de larges bouffées d'air pollué. On a eu beau salir le chauffeur en disant qu'il fumait énormément, qu'il avait une hygiène de vie inadéquate, je peux vous dire, pour l'avoir connu, que c'est faux; je le dénie formellement ! Thierry Morfoisse, pour conserver son permis poids lourd, était soumis à un contrôle médical régulier et sérieux. Je crois savoir qu'il avait passé une visite peu de temps avant les faits. Je constate qu'après avoir procédé à diverses analyses sur la dépouille, on (le parquet de Saint-Brieuc, NDLR) a traîné les pieds pour livrer les résultats. Les examens ont été menés en novembre et ils n'ont été rendus publics qu'il y a quinze jours. Je ne m'avancerais pas sur ce terrain-là, mais j'ai mon idée...[29]

Pour la famille, le cauchemar se poursuit s’amplifie, Thierry Morfoisse est calomnié, sa mémoire est salie, il est tué une nouvelle fois. 

L’affaire est close ?

Le 05 novembre 2009, Gérard Zaug procède à la clôture de l’affaire en l’absence d’infraction[30]. L’annonce est véritablement étonnante, ou plutôt, il est véritablement étonnant que cette annonce soit passée sans susciter de réaction, car elle relève véritablement d’un tour de magie.
Par cette annonce, il réduit le seul coupable d’infraction possible à l’algue verte tueuse et écarte totalement de ses conclusions et de son jugement toutes infractions qui auraient pu être relevées dans le domaine des conditions de travail des transporteurs de la société, dans laquelle travaillait le salarié mort au bas de son camion.  Ce tour de passe-passe est réalisé sans provoquer de réaction, ce qui semble incompréhensible ! 
Pour la famille Morfoisse, c’est l’abattement. Mr Morfoisse déclare On savait bien que les autorités cherchaient à classer l’affaire. Quand on avait rencontré le procureur, on avait bien compris quelles seraient les conclusions (…) Contre ces gens là on est démuni (…) Maintenant que voulez vous qu’on fasse ? On se sent pris à la gorge.  Pour la fille de la victime c’est le même désarroi C’était évident que ça serait ça. C’est des conneries de dire que mon père était un gros fumeur ! Il ne fumait pas dans sa maison. Et sa compagne, elle, ne fumait pas du tout. Il n’allait jamais chez le docteur ! (…) Et puis pourquoi a-t-on trouvé de l’hydrogène sulfuré dans son sang ? Je n’ai pas les moyens de poursuivre en justice ; j’ai une petite fille et je n’ai pas d’emploi. Mais je compte bien demander les résultats des analyses[31].
La famille Morfoisse est désemparée, démunie face à cette machine impitoyable qui s’est mise en marche. Eux aussi sont aveuglés par cet écran de protection crée par le procureur Zaug les détournant des véritables causes de la mort de Thierry Morfoisse. Ils restent bloqués sur les analyses médicales et n’abordent pas la question des conditions de travail du chauffeur. Carolanne souhaite obtenir les résultats d’analyses, comme un graal qui lui permettrait de faire son deuil plus facilement. Analyses qu’aurait dû avoir légitiment, dès le début de la procédure, la famille. Cette stratégie de rétention d’informations (importantes pour le repos de la famille) est une victoire pour Gérard Zaug. Elle lui permet de les détourner d’autres demandes possibles comme le fait que Thierry Morfoisse, et ses collègues, travaillaient à mains nues, sans masque, ni appareil de mesure des gaz, comme le dénonçait début septembre le Président du SMITOM. 
Le 05 novembre 2009, le procureur est satisfait, il a bien mené sa mission, pour lui : C’est terminé. A la question posée par Julian Vaillant concernant un recours possible, il répond : Seul un proche de la victime peut agir. Il doit saisir le procureur général ou le doyen des juges d’instruction. Mais ne peut déposer une plainte que quelqu’un qui a intérêt. En l’espèce, qui aurait intérêt ? Sa conjointe. Ses parents. Sa fille. Ils n’ont pas déposé plainte initialement. Je ne les vois pas contester le classement[32].
Le procureur a, dès le début de la procédure, bien cerné les personnes qu’il avait en face de lui : des personnes simples, honnêtes qui n’avaient jamais eues affaire à la Justice de leur pays avant ce drame. Les mener, comme il l’a fait, en dépolitisant l’affaire, vers une clôture sans suite était pour lui, au final un travail assez facile. Mais les suites furent un peu différentes de ce qu’il avait envisagé.

La constitution du Comité de soutien à la famille de Thierry Morfoisse.

C’est peu après la clôture de la procédure que des acteurs (connus et moins connus du grand public) d’associations de défense de l’environnement, qui jusqu’à présent, étaient restés en retrait de l’affaire, vont se manifester auprès de la famille Morfoisse.
Claude Lesné avait découvert le blog de Carolanne Morfoisse et l’avait signalé à André Ollivro, le porte parole d’Halte aux Marées Vertes. Touché par la lecture du texte[33], il entre en contact avec la fille du chauffeur puis rencontre ses parents. Après plusieurs entretiens où la confiance s’installe, il est décidé de les aider dans leur recherche de vérité.
Avec d’autres membres d’associations : Denis Baulier, d’Urgence Marées Vertes et Thierry Dereux de FNE 22 et après avoir consulté des juristes, est crée le 06 décembre 2009, à St Brieuc, le Comité de soutien à la famille de Thierry Morfoisse. C’est ce Comité qui assurera, si besoin est, le soutien juridique et financier à la famille. Une conférence de presse est tenue fin janvier 2010. Le rapport de force, face au procureur, n’est plus le même. Il avait réussi à écarter Thierry Burlot quelques mois plus tôt et il se retrouve face à une famille soutenue par des associatifs de la défense de l’environnement connus et reconnus. C’est un scénario qu’il n’avait sans doute pas envisagé.
Un des premiers objectifs de la famille et du Comité de soutien est l’obtention des résultats d’analyses que le procureur refuse de communiquer, pour des raisons fallacieuses, depuis des mois à la famille. Fin janvier son discours est totalement différent, c’est un tournant à 90° qui est effectué Si la famille nous fait des demandes, je ne vois pas pourquoi je ne donnerais pas les résultats. Lorsqu’une enquête en recherche sur les causes de la mort est ouverte, et que la famille exige des précisions, nous les donnons[34].  
Le procureur Zaug ne peut plus reculer ou jouer la division et finit par communiquer les résultats d’analyses à la famille le 25 février, plutôt contraint et forcé par la pression décisive exercée par le Comité de Soutien sur lui. La famille communique les documents au Comité qui les décryptes facilement. Ils comprennent mieux pourquoi le procureur fit de la rétention de documents. Le taux d’H2S révélé par l’analyse est très important. Il est dit dans la conclusion qu’il y a 1,4mg/l de sang qui indique une exposition massive à l’hydrogène sulfuré, pour autant on ne peut totalement écarter une formation post-mortem d’H2S dans le cas où les prélèvements biologiques n’auraient pas été conservés dans les conditions optimales (moins de 20°)[35]. Le procureur joue l’étonnement et ne comprend pas la nouvelle attitude « d’opposition » de la famille[36].
Les analyses sont confiées à Claude Lesné qui va travailler avec deux de ses collègues spécialistes reconnus : Françoise Riou, chef  du Département de Santé Publique de Rennes I et André Picot expert européen, créateur et ancien Directeur de l’Unité de prévention chimique au CNRS. Tous trois sont donc des personnalités scientifiques irréprochables. Leur contre-enquête, ne remet pas en cause le travail des experts mandatés par le procureur, mais contredit totalement les conclusions du procureur. Car ce dernier limite son explication uniquement sur une récidive d’infarctus en omettant de citer les deux dernières lignes du compte rendu anatomopathologique : Ces résultats sont cependant à interpréter en fonction des données toxicologiques[37].
Ces lignes sont capitales car c’est l’analyse toxicologique qui a révélé la forte concentration d’H2S (1,4 mg/l) dans le sang du chauffeur. Ce gaz est encore plus dangereux pour les sujets fragiles ayant déjà fait un infarctus, comme cela semble être le cas de Th. Morfoisse, même s’il ne le savait pas. Pour les trois scientifiques, les circonstances du décès de Monsieur Morfoisse sont suffisamment explicites pour que les représentants de l’Etat admettent à présent les faits et cessent de faire obstacle à la reconnaissance de ce décès en accident du travail[38]. Pour Thierry Burlot qui sort de son retrait Nous savions tous que, de par son attitude, le procureur de la République cachait une partie de la vérité (…) Aujourd’hui, une chose est certaine, plus rien ne pourra être comme avant. C’est de notre responsabilité collective d’appliquer le principe de précaution pour protéger les salariés et la population du fléau des algues vertes. Concernant d’éventuelles instructions au procureur, « la pire des choses serait de cacher la vérité. Il faut que toute la lumière soit faite. Tôt ou tard, la vérité apparaît. Vis à vis de la famille de M. Morfoisse, vis à vis de M. Morfoisse, c’est de notre devoir et notre responsabilité de faire toute la lumière sur cette affaire[39]. Pour le Comité de Soutien, c’est une première victoire vers la vérité.
Pour le procureur Gérard Zaug, il n’y a pas de commentaires à faire.
Le 22 avril les parents de Thierry Morfoisse et sa fille, représentés par Maître Cazo déposent plainte contre X, pour homicide involontaire, en s’appuyant pour une part importante sur les analyses et conclusions de la contre-expertise de Lesné, Riou et Picot. Le 28, ils reçoivent une ordonnance de dispense de consignation.
Cette dispense de consignation est le tout premier document papier officiel que reçoit la famille Morfoisse depuis le début de la procédure, commencée (avec l’enquête préliminaire du procureur Zaug) il y a huit mois, début septembre 2009 !
Le 28 mai 2010, ils sont reçut par la juge d’instruction Elisabeth Croize, qui ordonne le mois suivant, à la suite de cet entretient, un nouveau rapport toxicologique concernant la validité des résultats d’analyses de sang. Rendu le 01 août à la juge, il ne sera communiqué à l’avocat de la famille que six mois plus tard, début 2011 ! Ce rapport toxicologique complémentaire de Vincent Cirimele (Chem Tox), envisage toutes les possibilités à l’origine des 1,4mg/l d’H2S dans le sang de Thierry Morfoisse. Origine liée à l’inhalation de fortes doses d’H2S, en déchargeant des algues vertes en putréfaction ? Une absence de conservation de l’échantillon analysé par l’hôpital de St Brieuc ? La conjonction des deux possibilités décrites plus haut, sans pouvoir déterminer leurs parts respectives à l’origine de ce taux important ?
En décembre, Maître Cazo peut annoncer qu’il a enfin pu consulter le dossier Morfoisse. Certaines auditions (collègues de travail, chef d’entreprise et concubine) ont été effectué, sans que cela semble vraiment avancer. Toutefois deux éléments positifs importants sont à retenir : l’absence d’excès de consommation de nourriture, d’alcool et de cigarettes et surtout de tous moyens de protections et de toutes préventions contre les émanations résultant de la récolte et de la décomposition des algues vertes, alors même que les risques ne pouvaient pas être ignorés par l’employeur ? Ce dernier, fait par ailleurs l’objet d’observations et d’une obligation de contrôle de la part des services de l’Etat. Ces éléments sont importants car ils permettent de réorienter l’enquête vers les causes plus que probables à l’origine de la mort de Thierry Morfoisse. Causes qui furent soulevées dès août 2009 par le maire de Lanvollon et le Président du SMITOM.

L’Affaire Morfoisse au Pôle Santé de Paris.

Début 2011, un double changement intervient, Maitre Cazo quitte le cabinet et le dossier est repris par Maitre Larzul. Au Tribunal, c’est une nouvelle juge d’instruction, Emilie Castel qui est en charge du dossier. L’optimisme qu’affichait Maître Cazo quelques mois plus tôt, n’est plus d’actualité. L’instruction du dossier est à l’arrêt depuis mai 2010[40] et son dessaisissement au Pôle Santé de Paris est envisagé.
André Ollivro, pour le Comité de Soutien, n’est pas d’accord, car c’est éloigner le dossier alors qu’un virage semble s’être enfin amorcé dans l’instruction avec la prise en compte des conditions de sécurité défaillantes pour les salariés de l’entreprise : Nous avions bon espoir que ce décès soit reconnu comme un accident du travail[41].  
L’ouverture qui s’était amorcée sur cette orientation s’est rapidement refermée et l’instruction semble de nouveau totalement bloquée. Pour Maitre Larzul, Si la justice ne veut pas s’en occuper ici, à St Brieuc, et si des juges veulent  faire un travail plus poussé à Paris nous n’allons pas nous y opposer. Ce n’est pas un dépaysement qui nous fait plaisir mais si cela peut permettre de faire avancer les choses pourquoi pas ? Ce qui nous intéresse, c’est que cette affaire ne soit pas enterrée. Et nous nous battrons pour cela[42].
Le 20 avril 2011 le dessaisissement est signé et le dossier est transféré au Pôle Santé Parisien. La famille n’est convoquée au tribunal de Grande Instance de Paris que le 09 septembre par Anne-Marie Bellot, la Vice Présidente chargée de l’instruction. L’entretient est très humain, mais le stress inévitable provoque un évanouissement de Claude Morfoisse à la sortie du tribunal. Une nouvelle audition de tous les témoins est projetée et des résultats sont attendus d’ici quelques semaines, voire quelques mois.  
En fait d’auditions et de nouveautés, c’est le même scénario que celui initié par le procureur briochin qui est appliqué à Paris avec la décision  prise en avril d’engager des investigations qui ne se  limitent  semble-t-il qu’à de nouvelles contre-analyses sur le sang et les organes prélevés lors de l’autopsie de septembre 2009, par les mêmes experts. Le 22 août Maître Larzul prend connaissance des conclusions qui  restent celles de St Brieuc en 2009. C’est donc un retour en arrière… Initié par le juge d’instruction René Cros, le dossier est traité à l’automne par de nouveaux juges d’instruction : Aurélie Raymond et Anne Bamberger. Cette valse des juges d’instruction ne permet pas un bon suivi de l’affaire et sa délocalisation ne permet pas non plus une bonne appréciation des enjeux locaux. Encore une fois, toute l’attention est focalisée sur les expertises et contre-expertises, sans véritables avancées apparentes.
Les trois experts (le professeur Le Gueut, le docteur Le Gall et Mr Cirimele) commis par le Pôle Santé, appuient leurs conclusions sur de nouveaux dossiers saisis à la Médecine du Travail et chez le médecin traitant faisant état de tabagisme et d’hypertension. Autre argument, pour appuyer dans leurs conclusions une mort d’origine naturelle : le travail du chauffeur n’impliquait pas de contact direct avec les algues[43] !
Ce point est totalement étonnant car entièrement faux.
Ce dernier argument, facilement réfutable sur tous les plans (le maire de Lanvollon, dès le lendemain de la mort du chauffeur décrivait un processus de déchargement inévitablement dangereux pour le salarié et le Président du SMITOM appuyait ce témoignage en précisant que cela se faisait sans masque, ni appareil de mesure des gaz) est difficile à comprendre.
Est-ce une erreur involontaire des trois experts, pour bien faire, pour rester dans la ligne tracée par Gérard Zaug, pour rester dans l’axe de défense du ministère public ? Ou bien est-ce une erreur volontaire permettant à la défense, d’appuyer, avec des arguments incontournables, que les conditions de travail étaient véritablement très dangereuses pour la santé et la vie des salariés et qu’elles étaient à l’origine de l’infarctus mortel de Thierry Morfoisse ?
C’est en tous cas sur les bases de ces dernières conclusions que semble s’élaborer, au sein du Pôle Santé, un rejet de la plainte, dénoncé récemment par André Ollivro, au nom du Comité de Soutien à la famille de Thierry Morfoisse, le 04 mars dernier, sur France3 Ouest. C’est pour exposer les enjeux de cette grave éventualité, qu’est organisée, par le Comité de soutien la conférence du 10 avril prochain.

Putain d’algues, j’en ai marre !

Que retenir de toute cette dramatique histoire? Un salarié consciencieux, remplace un collègue malade, à cause des algues qu’il doit transporter. Que cette activité, de plus en plus pénible, a déjà provoqué, dans les derniers jours, parmi la petite équipe de chauffeurs de la SCREG, un ou deux arrêts maladie (dont un est maquillé en RTT ?). Nous sommes au milieu de la période estivale, les plages doivent être propres, cela doit sentir bon l’air marin et non l’œuf pourri… Et puis Binic n’est-elle pas le grain de beauté des Côtes d’Armor à préserver ?
Thierry Morfoisse, est constamment dans la cabine de son camion benne imposant. Il sillonne, comme ses quelques collègues, les petites routes de la baie de St Brieuc, la RN 12 et d’au-delà. Il ne fait pas de tourisme, mais transporte, sans perdre de temps, toutes sortes de déchets : gravats, terres, métaux, carcasses et restes d’abattoirs (et il y en a beaucoup sur le secteur). Il transporte aussi des déchets verts, mais les algues vraiment…, ça n’a rien à voir.  Ses dernières paroles à sa compagne résument bien la pénibilité de la tâche à accomplir, Putain d’algues, j’en ai marre !
Oui, les algues vertes, comme pour les riverains des communes polluées, comme pour les touristes qui vont voir ailleurs, constituent un véritable poison visuel et olfactif. Alors pour les chauffeurs les transportant en putréfaction qu’est-ce que c’est… ? Jusqu’au 22 juillet 2009, cette tâche est accomplie depuis plus de dix ans, comme les autres transports, sans protocoles particuliers. Pourquoi en serait-il autrement, puisque le discours officiel, d’une majorité de décideurs locaux de la filière agro-industrielle, affirme depuis des décennies que ce n’est pas dangereux ?
Cette question est importante pour comprendre le cas de l’affaire Morfoisse. Car en effet, en Bretagne et en Côte d’Armor en particulier, ce sujet est extrêmement sensible, voire totalement tabou. Cette véritable pollution est une des conséquences d’un modèle agricole breton destructeur. Les intérêts financiers privés, de toute cette filière, sont colossaux et les conséquences pour les finances publiques (quelles soient locales ou nationale) aussi. Ce constat transcende les partis politiques, il n’y a pas de véritables frontières. Pour les conseillers de Chantal Jouanno, il était, en août 2009, beaucoup moins coûteux pour la collectivité nationale de financer la reconversion de ce modèle vers un mode de production plus respectueux de l’environnement, que de continuer à payer les pots cassés d’un modèle intensif en crise profonde et à bout de souffle.
Mais les esprits ne sont pas prêts à affronter cette mutation nécessaire. Bien au contraire, le décret Le Fur qui nait, justement dans ce contexte et à cette période, fut reporté à fin 2013 par Fillon et signé par le gouvernement Ayrault. En application depuis le 1er janvier 2014, il marque la victoire des jusqu’au-boutistes de la production de masse intensive. Il vaut mieux produire de la protéine bas de gamme aux kilomètres pour l’exportation, avec toutes ses conséquences sociales et environnementales pour la Bretagne, que de la qualité, en moins grande quantité, dans des conditions plus respectueuses du vivant.  
La mort de Thierry Morfoisse en plein été 2009, sur le chemin d’un quatrième transport d’algues vertes en putréfaction a provoqué un choc immédiat, car le danger sanitaire qui avait été annoncé par les associations environnementales depuis des années et dénoncé par Thalassa quelques mois plus tôt, prenait hélas une forme concrète et dramatique. Comme le soulevait Thierry Burlot, cette mort impactait toute la filière de l’agro-industrie bretonne. Mais pas seulement, car cette pollution ne touche pas qu’une filière, elle impacte aussi tous les échelons de l’Etat et tout un territoire. C’est cette imbrication de toutes les responsabilités possibles que révèle cet accident du travail caché pendant plus d’un mois. C’est cet ensemble de conséquences qui explique la venue du Premier Ministre François Fillon, à St Michel en Grève et les inquiétudes de Thierry Burlot pour les collectivités.
L’accident du travail de Thierry Morfoisse est un révélateur tragique du danger sanitaire constitué par les algues vertes, conséquence directe d’un modèle de production. Le lendemain de sa mort, ce danger mortel est dénoncé par le maire de Lanvollon et le surlendemain, les chauffeurs la SCREG étaient équipés de masques et de détecteurs de gaz.
Que dire d’autre ? Si ce n’est s’interroger sur la stratégie du procureur briochin pour étouffer l’affaire. Evacuer ainsi au cours des mois tous les éléments probants contraires à sa version, jusqu’à en user la corde aux extrêmes limites, jusqu’à diviser les parties en face de lui, puis jusqu’à calomnier la victime. Tout cela est disons, au mieux, maladroit. Car même sur ce terrain là, sa stratégie ne fonctionne pas. Son principal et dernier argument pour retenir la mort naturelle de Thierry Morfoisse est sa mauvaise hygiène alimentaire (il mangeait pourtant comme ses collègues et sa famille) et un fort tabagisme. Si l’on suit bien l’argument du procureur, Thierry Morfoisse était un danger pour lui-même…
Il faut alors, sur ce point, poursuivre le raisonnement du procureur jusqu’au bout, car dans ce cas, il y a un gros problème, que soulevait déjà François Morvan, le maire de Lanvollon, au lendemain de la mort de Thierry Morfoisse. Ce salarié avait un métier particulier, c’était un chauffeur de poids lourd. Il avait un métier impliquant une responsabilité importante vis à vis de la sécurité publique. Il ne se contentait pas de conduire son camion sur des chantiers à basses allures. Il conduisait constamment son poids lourd sur les petites routes du département, traversait des villages et des villes, empruntait la RN12, sans perdre de temps. Sa vigilance devait être constante car au moindre pépin, cela pouvait être la catastrophe : une collusion avec d’autres véhicules, la perte de contrôle du sien, faucher un cycliste sur la route, des passants dans un bourg, des enfants à une sortie d’école etc..
Thierry Morfoisse (comme ses collègues) avait un métier à responsabilité et à risque pour lequel il était régulièrement et sérieusement suivit par la Médecine du Travail et si celle-ci avait décelé le moindre risque, elle l’aurait arrêté du fait même de son métier à forte responsabilité pour autrui. Thierry Morfoisse n’était pas un grand fumeur travaillant des dossiers dans un bureau, comme le procureur.
Dans le cas de l’accident du travail de Thierry Morfoisse, son aptitude physique et médicale l’autorisant à exercer son métier de chauffeur poids lourd ne dépendait pas de sa responsabilité ou de celle de l’entreprise qui l’employait, mais des services de la Médecine du Travail.
Dans un cas comme dans l’autre, les responsabilités, du fatal accident du travail de Thierry Morfoisse, ne peuvent hélas qu’être multiples. C’est pourquoi, il ne faut pas perdre de vue les premières réactions du maire de Lanvollon et celle du Président du SMITOM de Launay-Lantic qui pointaient avec lucidité la nouvelle problématique qu’impliquait cet accident mortel. Ce dossier des algues vertes prend une nouvelle tournure… pour la santé publique de tout un chacun, c’est un sujet dangereux déclarait Thierry Burlot, dès le lendemain de la venue, à St Michel en Grève, du Premier Ministre François Fillon, en août 2009. Puis il poursuivait, comme nous l’avons vu, au début de ce triste récit : Qui demain sera responsable s’il y a de nouveaux drames ? (...) Peut-on garantir en tous temps la sécurité des ouvriers qui vont travailler autour de ces produits[44].  C’est effectivement la principale problématique que ce tragique accident du travail soulève. Elle est réglée dès le surlendemain par la SCREG qui a équipé tous ses chauffeurs de masques et détecteurs d’H2S, en juillet 2009. En 2014, cette dramatique problématique demande une réponse équitable de la justice pour la famille du chauffeur mort au bas de son camion.
La famille Morfoisse est convoquée au Tribunal de Grande Instance de Paris le 25 avril prochain. C’est, pour elle, la première entrevue avec un juge d’instruction du Pôle Santé de Paris, depuis près de vingt mois d’attente et de doutes. Il faut souhaiter qu’une solution judiciaire, enfin juste, soit trouvée dans cette affaire dramatique. Il faut souhaiter et le dossier le permet amplement, que la défense des intérêts de l’Etat, à tous ses niveaux, s’ouvre sur plus de justice pour la mémoire salie de Thierry Morfoisse et de sa famille.  Télécharger le document en pdf 

 [1]. Qu’avait déjà transporté le matin de sa mort Thierry Morfoisse ? Des algues, comme nous l’a déclaré son père ou d’autres types de déchets ?
 [2].  Syndicat Mixte Intercommunal de Traitement des Ordures Ménagères.
 [3].  Algues Vertes, une enquête ouverte, Arnaud Morvan et Julien Vaillant, Le Télégramme, 08 09 2009.
 [4].  Algues Vertes, vers un scandale sanitaire, Soazig Quéméner, Journal du Dimanche, 12 09 2009.
 [5]. Témoignages de la fille et des parents de Thierry Morfoisse.
 [6].  Dès les premiers jours après la mort du salarié de la SCREG, les relations entre sa famille (qui se réduit à ces parents et sa fille) et sa compagne sont coupées. 
 [7].  Octobre 2007 est aussi une période importante car le 25, le Tribunal Administratif de Rennes établit le lien entre pollution agricole et algues vertes et avancée considérable, fait descendre le seuil acceptable de nitrate de 50 mg / l, à entre 5 et 10 mg/ l. A moins de 5 mg de nitrate/l, les algues vertes ne peuvent plus se développer. C’est une victoire pour les associations environnementales car cela implique un nouveau modèle de production. La décision du tribunal est combattue par l’ensemble de l’agro-industrie intensive et le Gouvernement qui fait appel de la décision dès le 21 décembre.
  [8].  Vincent Petit veille, avec une grande attention, à la conservation des échantillons de son cheval pour les analyses qu'il fait pratiquer par deux labos différents et porte légitiment plainte.
 [9].  Il a été mis au courant du drame par François Morvan, le maire de Lanvollon.
 [10].  YouTube, interview mise en ligne le 21 08 2009
[11].  Un ramasseur. « Le masque on devrait nous l’imposer », interview recueillie par Julien Vaillant, Télégramme 08 09 2009.
 [12].  Mort du Chauffeur, réaction de Thierry Burlot, Le Télégramme, 11 09 2009
 [13].  Algues Vertes, questions autour d’un décès, Bruno Alvarez, Jean-Yves Hinault, Ouest-France 05-06/09/ 2009.
[14].  Deux prélèvements furent effectués au moment du décès. Le premier fut utilisé pour l’analyse d’alcoolémie qui était négatif et le second en cas d’analyses ultérieures.
 [15].  Quatre mois de doutes et de craintes, Arnaud Morvan et Julien Vaillant, Le Télégramme, 08/12/2009.
[16].  Mairie de Binic, compte rendu du CM du 08 septembre 2009.
[17].  Affaire Morfoisse. L’avocat veut poursuivre le combat judiciaire, Julien Vaillant, Le Télégramme, 09/04/11.
[18]. Témoignage de Claude Morfoisse.
[19].  A la question de Julien Vaillant concernant ses présentations contradictoires sur la conservation de l’échantillon de sang, il se contente de répondre : Les gendarmes m’ont dit que le sang avait été conservé au frigo mais, le jour de la réquisition, nous nous sommes rendu compte que le flacon était resté dans une armoire. Décès suspect : le procureur clôt l’affaire, Julien Vaillant, Le Télégramme, 06/11/2009.
[20]. Algues Vertes et décès suspect d’un salarié : précisions… Le Post.fr, T. Burlot, 02/10/2009.
[21].  La cause « quasi certaine » du décès d’un chauffeur, Le Télégramme, 02/03/2010.
[22].  Algues vertes. Une enquête ouverte, Arnaud Morvan, Julien Vaillant, Le Télégramme, 08/09/2009.
[23].  Algues Vertes, vers un scandale sanitaire, Journal du Dimanche, 12/09/2009.
 [24].  La cause « quasi certaine » du décès d’un chauffeur, op.cit..
[25].  Le corps du chauffeur autopsié, Julien Vaillant, Le Télégramme, 01/10/2009.
[26].  Les propos du procureur remis en cause, Julien Vaillant, Le Télégramme, 02/10/2009.
[27].  Quatre mois de doutes et de craintes, Julien Vaillant et Arnaud Morvan, Le Télégramme, 08/12/2009.
[28].  Algues Vertes. Décès suspect : le procureur clôt l’affaire, Julien Vaillant, Le Télégramme, 06/11/2009.
[29].  La cause « quasi certaine » du décès d’un chauffeur, Le Télégramme, 02/03/2010.
[30].  Algues Vertes, Décès suspect : le procureur clôt l’affaire, julien Vaillant, Le Télégramme, 06/11/2009.
 [31].  Ibid., Arnaud Morvan.
[32].  Ibid., Julien Vaillant.
 [33].  Ce drame a replongé le militant dans un drame familiale remontant aux années Trente où son grand-père cheminot, fut broyé par un train en gare de St Brieuc et dont la mort ne fut pas reconnue comme accident du travail.
[34].  On veut savoir de quoi est mort notre fils, Jean-Yves Hinault, OF 21/01/2010.
 [35].  Algues : le doute autour du décès du chauffeur, Catherine Lemesle, 26/02/2010.
[36].  Ibid..
[37].  Décès suspect, les algues incriminées par trois experts, Julien Vaillant et Arnaud Morvan, Le Télégramme, 06//03/2010.
 [38].  Les algues vertes sont la cause quasi certaine du décès du chauffeur breton, Gérard Borvon, 08 /03/ 2010.
[39].  La cause « quasi certaine » du décès d’un chauffeur, op.cit..
 [40].  L’inspectrice du travail n’a pas été entendue, ni confrontée aux salariés qui ont modifiés leurs témoignages, il n’y a pas d’investigations à propos de la conservation ou non conservation de l’échantillon de sang, rien sur l’origine des vomissements de Thierry Morfoisse, rien sur les taux d’H2S au moment du déchargement, Affaire Morfoisse. L’avocat veut poursuivre le combat judiciaire, Julien Vaillant, Le Télégramme, 09/03/2011.
 [41]. Le dossier Morfoisse transféré à Paris ? Julien Vaillant, Le Télégramme, 31/03/2011.
[42]. L’avocat veut poursuivre le combat judicaire, op. cit..
 [43].  Les algues vertes, Affaire Morfoisse : vers un non lieu ? Julien Vaillant, 06/ 10/ 2012.
[44].  Voir note 10.